Au-delà du symbole schématique simple (et trompeur) du condensateur polarisé (figure 1), c'est un composant sophistiqué et essentiel de nombreux circuits électroniques. Ce condensateur, souvent dénommé condensateur électrolytique ou simplement « électrolytique » en raison de sa construction), jour un rôle essentiel visant à garantir que l'alimentation de sortie peut fournir le courant nécessaire (et à la tension d'alimentation CC nominale).
Figure 1 : le symbole le plus courant pour un condensateur polarisé aux États-Unis (a) et en Europe (b) ; il existe de nombreuses variantes.
Pourquoi utiliser un tel condensateur et pourquoi est-il polarisé ? Le rôle principal de ce condensateur est d'agir comme conteneur de stockage de réserve d'énergie électrique pour la charge, même lorsque la sortie de l'alimentation elle-même (généralement une alimentation CC/CC) présente une ondulation de 60/120 Hz (50/100 Hz dans certains pays) en raison de la nature du circuit de régulation de l'alimentation.
Un condensateur 33uF en aluminium de Lelon Electronics.
Le condensateur se comporte comme un réservoir d'eau : le cœur du l'alimentation pompe de l'énergie (eau) dans le réservoir, mais de manière irrégulière. La charge (les utilisateurs) pompe cette réserve d'eau à différents débits qui changent parfois lentement, parfois extrêmement rapidement et de manière transitoire. C'est nécessaire malgré les fluctuations dans le conduit d'alimentation principal qui provient de la centrale d'épuration. Il faut éviter les fluctuations de pression d'eau (tension) malgré les changements de débit (courant) à la source ou sur la charge.
Le condensateur joue un rôle d'amortisseur ou de tampon de l'énergie électrique. En outre, il adoucit les ondulations sur la sortie du régulateur de base lorsque la charge est constante et fournit de l'énergie à mesure que la charge elle-même varie. Pour ces raisons, les condensateurs électrolytiques à grandes valeurs utilisés à la sortie des alimentations électriques sont souvent appelés composants « de stockage en vrac » et agissent comme filtres de base contre les fluctuations indésirables de tension de sortie de l'alimentation malgré les changements de tension de sortie du régulateur ou de la demande de charge.
En principe, un condensateur est composé de deux surfaces conductrices séparées par un élément diélectrique. Cet élément diélectrique peut être de l'air, du papier, de la céramique ou un film chimique électrolytique spécialisé. La plupart des condensateurs électrolytiques sont constitués de deux fines feuilles métalliques (aluminium, tantale ou niobium) dont l'une est enduite d'oxyde diélectrique. L'ensemble est ensuite roulé (figure 2).
Figure 2 : à l'intérieur d'un condensateur électrolytique à base d'aluminium se trouvent les couches séparées par un élément diélectrique, puis roulées dans un cylindre. (Source : Nichicon Corp.)
Une fois l'assemblage terminé, l'unité est scellée avec un revêtement spécialisé, qui peut être en plastique, en époxy, en métal ou autre matériau, dont le rôle est d'isoler contre l'humidité tout en confinant le matériau électrolytique en cas de fuite chimique ou de panne de l'unité (figure 3).
Figure 3 : un condensateur électrolytique prêt à l'emploi ; celui-ci est évalué à 10 000 μF (0,1 F), 15 V CC et mesure 40 mm de haut et 18 mm de diamètre. (Source : Kemet Corp.)
Avec un élément diélectrique non chimique, le condensateur n'est pas polarisé et il est possible de l'utiliser avec des formes d'ondes CA ; il est également possible de l'insérer dans n'importe quel sens dans le circuit. Toutefois, en raison de la nature chimique du film et de l'assemblage des condensateurs électrolytiques, il convient de respecter la polarité lors de l'installation et de l'utilisation. L'inversion de la tension sur un tel appareil le dégradera, puis l'endommagera.
Puisque cette contrainte existe, pourquoi donc utiliser des condensateurs électrolytiques polarisés ? La réponse est simple : pour atteindre une densité capacitive élevée et sa valeur apparentée. La plupart des alimentations électriques CA/CC ont besoin de capacitance de plusieurs centaines à plusieurs dizaines de milliers de microfarads (μF), ce qui ne peut être atteint dans un composant de taille raisonnable utilisant un assemblage de condensateurs électrolytiques. L'utilisation de céramique ou d'air en guise d'isolant diélectrique nécessiterait un volume de condensateur entre 100 et 1 000 fois plus grand.
Le coût est également à prendre en considération : un condensateur plus grand nécessiterait plus de matériaux, entraînant un coût direct plus élevé, de l'espace supplémentaire sur les cartes des ordinateurs ou une alimentation électrique plus puissante (et donc des coûts induits plus élevés). Il peut sembler judicieux de recourir à des supercondensateurs en raison de leur petite taille et de leur capacité à fournir plusieurs farads, mais ils ne peuvent pas gérer le courant d'ondulation ou la nature charge/décharge du régulateur d'une alimentation et sa charge.
Paramètres clés de sélection
Le paramètre principal de ces périphériques de stockage en vrac est bien évidemment leur capacitance. Les valeurs des condensateurs électrolytiques vont de 1 μF à des milliers de μF. Si plus de capacitance que ce qu'un composant unique peut fournir est nécessaire, il est bien sûr possible d'utiliser des condensateurs en parallèle.
Le paramètre suivant que le concepteur doit sélectionner est la tension de fonctionnement, généralement désignée sous l'acronyme WVDC (CC de tension de fonctionnement). Il s'agit de la tension nominale CC maximale à laquelle le condensateur fonctionnera de manière fiable. C'est aussi une fonction de la conception et du boîtier. Plus le WVDC est élevé, plus le périphérique lui-même doit être grand pour pouvoir supporter les arcs et les situations de perçage et plus il coûte cher ; de concepteur doit donc être prudent et ne pas être trop gourmand. La plupart des concepteurs utilisent une marge de sécurité en divisant par 2 la valeur du WVDC pour s'adapter à toute ondulation ou tout courant transitoire envoyé de l'alimentation au condensateur ; ainsi, un condensateur avec 25 V de WVDC devrait être utilisé sur une alimentation électrique de 12 V CC.
Idéalement, le condensateur devrait respecter exactement cette valeur, mais en réalité tous les condensateurs présentent une résistance de série équivalente et une inductance propre. La résistance de série équivalente d'un condensateur de haute qualité est de l'ordre de 0,1 à 1 Ω ; plus la résistance de série est élevée, moins le condensateur fonctionnera de manière idéale. Il peut même entraîner un mauvais fonctionnement du circuit du régulateur. Dans les condensateurs électroniques de moindre qualité, la résistance de série équivalente augmente avec le temps et la température, et peut même atteindre des dizaines d'Ohms, avec des conséquences néfastes. Les condensateurs présentent également une fuite de courant en raison de l'isolant diélectrique imparfait.
En outre, chaque composant présente bien évidemment une inductance parasite ; dans le cas des condensateurs, cette dernière est de l'ordre de quelques millihenry (mH). Même si cette valeur faible ne pose généralement aucun problème à des fréquences sur une ligne de courant alternatif, cela peut être un problème à mesure que la fréquence de fonctionnement de l'alimentation augmente, et peut entraîner une instabilité du circuit, voir même une panne.
Les condensateurs électrolytiques ont également des tensions de tolérance, comme tous les composants ; une tolérance de ±20 % est courante, même si certains affichent des tolérances plus élevées. Même si cela peut paraître être une large marge de tolérance, c'est acceptable dans l'application.
Pour soutenir l'analyse de performance et de stabilité du concepteur, la plupart des fournisseurs de condensateurs proposent des modèles qui intègrent la résistance de série équivalente, l'inductance, la résistance aux fuites et d'autres caractéristiques imparfaites (figure 4). Ces informations peuvent être données à une fréquence de niveau ligne ou à des fréquences plus élevées, ainsi qu'à différentes températures.
Figure 4 : un modèle simplifié à fréquence faible de condensateur électrolytique montre le condensateur de base, ainsi que la résistance aux fuites, la résistance de série équivalente et l'inductance ; pour une utilisation RF, le modèle disposerait de différents éléments parasites internes, ainsi que d'une inductance et d'une capacitance parasites de fil.
Dégradation des condensateurs électrolytiques
Les condensateurs électrolytiques doivent généralement fonctionner selon des spécifications données pendant plusieurs milliers d'heures, bien qu'ils soient souvent utilisés au-delà de la durée de vie prévue avec des résultats acceptables. (C'est le cas d'une alimentation électrique d'un ordinateur de bureau en fonctionnement depuis longtemps et qui reste allumé la plupart du temps).
Outre le fonctionnement évident au-delà des tensions établies, chaque composant électronique est soumis à des facteurs qui agissent sur sa fiabilité et sa durée de vie utile. Il en va de même pour les condensateurs.
La chaleur est le facteur qui agit le plus couramment sur la durée de vie : il peut être nécessaire, pour un condensateur prévu pour fonctionner 10 000 heures à 25 °C, d'annoncer une durée de 1 000 heures à 85 °C et encore moins à 105 °C. Puisque la plupart de ces condensateurs sont utilisés dans des alimentations électriques, qui chauffent généralement et dont la température à certains endroits dépasse celle du boîtier, ces périphériques de stockage en vrac présenteront une durée de vie plus courte. Des fournisseurs proposent des condensateurs annonçant une durée de vie longue à des températures plus élevées, ce qui permet de contourner le problème. (Notez qu'une température élevée de stockage hors fonctionnement agit également sur la durée de vie, mais le scénario et la spécification sont différents).
Le deuxième facteur qui raccourcit la durée de vie des condensateurs électrolytiques est le courant d'ondulation auquel ils sont soumis. Ce courant est la fluctuation inévitable de la sortie du régulateur de tension servant à charger le condensateur. Pour des raisons électromécaniques complexes, le courant d'ondulation raccourcit la durée de vie du condensateur et de son électrolyte ; plus le courant d'ondulation est élevé, plus la dégradation est importante et rapide. La sensibilité du courant d'ondulation est une fonction de l'assemblage et des matériaux utilisés ; les fournisseurs indiquent la durée de vie utile en fonctionne de différentes valeurs de courant d'ondulation.
Il existe un facteur non technique que les concepteurs doivent également garder à l'esprit après avoir sélectionné le bon condensateur et le modèle correspondant auprès du fournisseur. Il est relativement facile pour des pièces de qualité moindre, de remplacement ou même contrefaites de se faire un chemin dans le flux de production et d'assemblage. Cela s'explique par le fait qu'il est relativement aisé de produire un condensateur adéquat qui fonctionnera suffisamment bien, au moins pendant un temps. Toutefois, le produit lui-même verra sa durée de vie raccourcie une fois mis en service. À ce moment-là, il sera trop tard et cela deviendra un problème épineux.
Gardez à l'esprit qu'il est également tentant pour le groupement d'achat de l'usine de production de remplacer le condensateur spécifié par la nomenclature du concepteur par un condensateur « similaire » présentant les mêmes spécifications de haut niveau (capacitance, WVDC et taille). Il peut présenter des spécifications différentes, secondaires mais néanmoins importantes, comme la résistance de série équivalente ou la tolérance de courant d'ondulation, et la modification de la nomenclature peut nuire à la performance et à la fiabilité du système. Il est crucial, pour les ingénieurs qui travaillent avec la chaîne d'approvisionnement de la production, de garantir l'intégrité et la traçabilité du condensateur selon le fournisseur source spécifié.
Les condensateurs électrolytiques qui se trouvent entre le régulateur de l'alimentation électrique et la charge peuvent être considérés comme anodins et quelconques. Néanmoins, ils sont essentiels à un courant continu et stable pour le circuit. Par conséquent, les concepteurs doivent les spécifier et les sélectionner en fonction de leurs paramètres principal et secondaires, ainsi que des conditions d'utilisations, tout en conservant à l'esprit les problématiques de chaîne d'approvisionnement, moins évidentes.